Colloque en 5 VIDEOS – « Alain et l’enseignement de la philosophie » – université de Rouen – 2012
Ce colloque a pour objet de mettre en exergue l’originalité d’Alain en tant que professeur de philosophie à travers ses différentes pratiques de l’enseignement et son ouverture à des publics variés – depuis les élèves de sa classe de philosophie jusqu’à ses lecteurs de La Dépêche de Rouen, en passant par le public des Universités populaires.
Il vise à faire ressortir la conception de la philosophie d’Alain à travers ses différents modes d’enseignement, la variété de ses canaux de diffusion, davantage que d’étudier ses Propos sur l’éducation et sa pédagogie de l’enfant. Pour autant, il pourra être également intéressant de se demander, en matière d’enseignement de la philosophie, quelle conception de l’éducation y est impliquée, et comment la pratique de l’enseignement d’Alain a façonné l’enseignement de la philosophie en classe terminale dans les décennies après lui.
LISTE DES CINQ INTERVENTIONS :
1 – Pierre Heudier (vice-président de l’association ‘Les amis d’Alain »), « Promenade biographique illustrée à travers quelques pages d’Alain » vidéo de 45mn
2 – Eric Oudin (professeur de philosophie en classes préparatoires au lycée Michelet Vanves), « La rencontre de Lagneau et d’Alain au Lycée Michelet de Vanves » vidéo de 45mn
3 – Emmanuel Blondel (Professeur de philosophie ; Directeur littéraire de l’Institut Alain), « Un Ami au service de l’Esprit : Alain au lycée Corneille de Rouen » vidéo de 45mn
4 – Thierry Leterre (professeur de Science Politique à Miami Ohio, Président de l’association ‘Les amis d’Alain’), « Alain et l’Université philosophique » vidéo de 45mn
5 – Hervé Boillot (professeur de philosophie au lycée Descartes à Antony), « L’enseignement de la philosophie dans l’enseignement secondaire de la Libération à nos jours : l’héritage d’Alain en débat » vidéo de 45m
1 – Promenade biographique illustrée à travers quelques pages d’Alain par Pierre Heudier, vice président de l’Association des Amis d’Alain
2 – « La rencontre de Lagneau et d’Alain au Lycée Michelet de Vanves » par Eric Oudin, professeur de philosophie en classes préparatoires au lycée Michelet de Vanves
3 – Un Ami au service de l’Esprit : Alain au lycée Corneille de Rouen par Emmanuel Blondel, Professeur de philosophie, Directeur littéraire de l’Institut Alain
4 – Alain et l’Université philosophique, par Thierry Leterre, professeur de sciences politiques à l’université de Miami, Ohio, président de l’Association des Amis d’Alain
5 – L’enseignement de la philosophie dans l’enseignement secondaire de la Libération à nos jours : l’héritage d’Alain en débat, par Hervé Boillot, professeur de philosophie au lycée Descartes, Antony
RESUMES DES INTERVENTIONS
Pierre Heudier « Promenade biographique illustrée à travers quelques pages d’Alain »
Alain, boursier et combattant de la République, juge très tôt qu’il ne peut se contenter d’écrire pour ses collègues dans des revues de philosophes et se lance dans le journalisme. Il laissera 5000 Propos – écrits bénévolement pour la presse de gauche – portant sur les sujets les plus divers (philosophie, littérature, astronomie, politique, religions, pédagogie, arts…), convaincu que la République ne peut se maintenir que si le savoir et surtout la capacité de juger sont partagés par le plus grand nombre. Dans le même esprit militant, il fondera une Université populaire à Lorient et animera celles de Rouen et de Paris, y dirigeant des débats et y donnant des conférences sur la physique, l’électricité, l’astronomie, etc.
Eric Oudin, « La rencontre de Lagneau et d’Alain au Lycée Michelet de Vanves »
La rencontre de Jules Lagneau, dont il suivit les cours en tant qu’élève en classes préparatoires au lycée Michelet de Vanves, décida de la vocation d’Alain. Me voilà au lycée Michelet, où je suivis les leçons de Jules Lagneau. Je connus un penseur, je l’admirai, je résolus de l’imiter », écrit-il dans le chapitre consacré à Lagneau de son Histoire de mes pensées. A la mort de Lagneau, Alain écrit : « C’est à ceux qui l’ont aimé et auxquels il a donné toute sa pensée, de faire qu’il occupe après sa mort, parmi les plus profonds philosophes de notre temps, la place qu’il aurait dû avoir pendant sa vie » et il s’y emploiera personnellement toute son existence. Cette rencontre n’intéresse pas seulement les biographes d’Alain, elle concerne également les historiens de l’enseignement philosophique. En effet, ce qu’Alain emprunte à Lagneau, c’est une certaine manière de faire de la philosophie en classe, qu’il reprendra à son compte et qui deviendra en quelque sorte emblématique de l’enseignement philosophique à la française. C’est à éclairer ce point que je consacrerai l’essentiel de mon propos.
Emmanuel Blondel, « Un Bel-Ami au service de l’Esprit : Alain au lycée Corneille de Rouen »
La figure d’Alain professeur s’est longtemps nourrie de témoignages, souvent fervents, parfois distanciés, qui cernaient davantage une attitude, parfois quelques pratiques, plutôt qu’un contenu d’enseignement déterminé. Les cours d’Alain ne nous sont guère connus que par des rédactions fragmentaires, à l’exception des conférences données au collège Sévigné, qui ne reflètent pas à proprement parler son activité de professeur. Il se trouve que le cours le plus complet qui nous soit parvenu est celui qu’Emile Chartier dispensa à ses élèves du lycée Corneille durant l’année 1900-1901. La restitution récente de ce cours n’a pas encore suscité les études que les rédactions de cours prononcés par Alain auraient pu depuis longtemps susciter. On s’efforcera ici de faire apparaître la structure générale de ce cours, sa façon d’intégrer aux questions du programme les problématiques philosophiques qui travaillaient alors la philosophie française, et particulièrement le double rapport de filiation et de fidélité qui s’y manifeste de façon très distincte à l’égard des hautes figures de Jules Lagneau et de Jules Lachelier.
Thierry Leterre « Alain et l’Université philosophique »
Alain a légué à l’imaginaire collectif, y compris l’imaginaire cultivé, l’image d’un grand professeur de philosophie et d’un enseignement exceptionnel et hors norme. L’image n’est pas fausse, mais elle néglige l’un des faits plus importants au sujet d’Alain : Alain, c’est l’intellectuel et le philosophe publics, qui prend position par l’écriture ; le professeur dans sa classe, c’est Emile Chartier. Sans doute, il est impossible de séparer les deux figures : mais il n’est pas non plus légitime de les confondre. Si l’on maintient une distance correcte de l’un à l’autre, on remarque que l’un des apports les plus significatifs d’Alain à l’enseignement de la philosophie est de l’avoir promu dans d’autres lieux que ceux des institutions de son temps, c’est-à-dire ce qu’on appelait « l’université » et qui incluait tant les lycées que l’enseignement supérieur proprement dit. On retracera donc le parcours d’Emile Chartier l’universitaire à Alain le philosophe en l’interprétant comme une rupture par rapport aux normes universitaires en formation à son époque qui réclamaient pour elles le monopole d’une philosophie dans laquelle Alain persiste au contraire à voir une pratique publique ouverte sur d’autres horizons que ceux de l’école.
Hervé Boillot « L’enseignement de la philosophie dans l’enseignement secondaire de la Libération à nos jours: l’héritage d’Alain en débat »
On voudrait montrer dans cette communication le rôle qu’a joué Alain, indirectement, sur l’enseignement de la philosophie en France à partir de la Libération, par l’intermédiaire de ses amis et disciples actifs au sein de l’Association des professeurs de philosophie de l’enseignement public ou au sein de l’Inspection générale. Il s’agit moins d’y voir une simple continuité qu’un choix, celui de renouer avec une tradition pédagogique et philosophique, au-delà de la rupture morale et politique suscitées par la défaite et l’Occupation.
Qu’il s’agisse d’un choix autant que d’une fidélité au souvenir d’un maître influent, on le voit à ceci que l’enseignement de philosophie était à la croisée des chemins dès la Libération et pendant toutes les années 1950 et 1960, et que l’idéal-type de l’enseignement représenté par Alain a dû s’imposer contre d’autres, dans un champ philosophique et universitaire qui avait profondément bougé. Pour éclairer l’influence à distance d’Alain sur l’enseignement de philosophie après-guerre et sur sa pédagogie, on se demandera donc ce qu’il lui doit, quels en ont été les médiateurs, mais aussi quelles étaient les représentations concurrentes dont elle a dû triompher. On replacera donc l’héritage d’Alain dans le champ de l’enseignement de philosophie des lycées après guerre.
Pour cela, nous nous appuierons sur l’état du débat autour de l’enseignement de la philosophie au sein des professeurs de philosophie, tel que nous pouvons le reconstituer à travers la lecture de la littérature professionnelle, à savoir essentiellement la Revue de l’enseignement philosophique – dénommée L’enseignement philosophique depuis 1987.
